Dubuis & Rudaz dans la presse

Pourquoi le vin naturel ?

INTERVIEW «LA COULEUR DU VIN» AVEC PHILIPPE DUBUIS

 
Philippe, peut-on dire que tu produis des vins naturels ?
Oui j’élève des vins naturels , c’est-à-dire des raisins produits en respectant le plus la nature, nous n’utilisons plus de produits de synthèse, d’herbicides, ni d’engrais chimiques. Nous utilisons des méthodes biodynamiques sur nos vignes et cela depuis de nombreuses années. Depuis le millésime 2022, l’ensemble de nos vignes sont certifiées Bio Suisse. Tous nos vins sont élevés aux normes Bio et portent maintenant le label Bourgeon Vert de Bio Suisse, je pense que je peux affirmer sans autre que mes vins sont naturels.
 
Cet environnement, ce “terroir” dont on parle souvent, ne se perd-il pas en raison d’une oenologie-chimie de plus en plus corrective et permettant une multitude de manipulations?
Bien entendu, on perd la notion de terroir car on n’est plus en symbiose avec lui. Les anciens nous ont légué un sol qui a une mémoire, c’est cette mémoire qui fait qu’un vin “terroire” ! Mais il est clair qu’aujourd’hui, expliquer et faire apprécier la multitude de goûts différents n’est pas assez commercial… C’est la différence culturelle fondamentale entre les vins du Nouveau Monde et l’Europe: eux pensent en terme de boisson, nous en vin.
 
Ils sont pourtant forts en matière de marketing, leurs vins apparaissent dans les concours…
Oui, c’est ça, ils élaborent des vins oenologiquement parfaits, pas de place au terroir, on standardise sans défaut! Les concours ne veulent rien dire s’ils sont dirigés par des intégristes de l’oenologie. C’est insensé! Le vin c’est l’âme de la terre, nous essayons d’interpréter cette terre un peu comme un cuisinier interprète un plat: il a des ingrédients naturels, il les dispose de manière à exhausser les saveurs. Je me considère comme un “cuisinier du vin”, je m’efforce d’exhausser les saveurs de la terre. Mais il est clair que l’on est entré dans l’ère du vin boisson.
 
Plus que le pétrole, l’eau va devenir un enjeu vital pour notre planète, or ces vins dits du Nouveau Monde pratiquent massivement l’arrosage des vignes, bien loin d’une prise de conscience écologique, qu’en est-il en Valais?
Le Valais a connu des années de surproduction qui n’ont plus aucun sens aujourd’hui. Arroser massivement, c’est traiter la vigne massivement et ensuite manipuler et corriger massivement les vins en cave, c’est la fuite en avant! Un bon vigneron est d’abord un bon observateur de ses vignes. Sur certains terrains, par exemple des schistes peu rétenteurs d’eau, si la vigne souffre dans une année d’extraordinaire sécheresse, on peut, par un léger arrosage, lui éviter un stress hydrique. Mais cela se fait en amont, et finalement, un bon vigneron arrose très peu, tout au plus une fois par saison. On est loin des brumisateurs de la Nappa Valley…
 
Comment vois-tu l’avenir?
Pour notre domaine, il est radieux! (rires). C’est finalement aux consommateurs de choisir et je leur dirais: “Buvez peu mais buvez bon”, et le maître-mot pour s’y retrouver, c’est la confiance. La confiance organisée en chaîne entre le producteur qui s’emploie à respecter son terroir et le distributeur sérieux qui cherche et déguste pour ne proposer que des vins naturels.
    
La phrase de la fin ?
En goûtant nos vins vous découvrez la minéralité des sols, l’intensité aromatique et les couleurs naturelles propre à chaque cépage, bref des vins de plaisir !